Orphelins…


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Orphelins…

Profonde tristesse à l’annonce du décès d’Aharon Appelfeld, immense écrivain chez qui la gravité n’excluait pas la tendresse, ni la douleur l’espoir et le sourire, fût-il doux-amer.

Sa langue nous a accompagnés des années durant, amoureusement et minutieusement traduite en français par l’écrivaine Valérie Zenatti. Dans Le garçon qui voulait dormir (éd. de L’Olivier, 2011), il mettait en scène l’adolescent qu’il fut au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, son renoncement à la langue allemande, langue maternelle mais mortifère (qui ne surgira plus que dans ses rêves et ses dialogues avec sa mère morte) et son cheminement dans l’apprentissage et la connaissance de l’hébreu qui deviendra sa langue de vie et d’écriture.
 
Il y a quelques années, le réalisateur Arnaud Sauli avait entrepris de consacrer un film à Aharon Appelfeld et de parcourir avec lui la mémoire de son trajet de l’Europe vers Israël, accompagnés dans ce voyage par Valérie Zenatti. Ce film, Le Kaddish des Orphelins (produit par Dublin films), sera rediffusé lundi 8 janvier sur France 3 (après Soir 3), ne le manquez pas, la voix d’Aharon Appelfeld y est douce et précise, inoubliable. « Je n’écris pas des livres, j’écris une saga du peuple juif. J’écris sur un siècle de solitude juive. »


On peut également relire – outre les livres bien entendu ! – un entretien que Valérie Zenatti accorda à Télérama le 29 août 2016, au moment de la première diffusion du film d’Arnaud Sauli. Extrait :
« Quand Aharon écrit un nouveau livre ou sait que je vais en traduire un, le rituel veut qu’il m’en lise les premiers chapitres à haute voix. C’est un moment très important pour nous deux car je suis à ce moment-là une des premières personnes, si ce n’est la première, à entendre le texte. Il me transmet la musique orale du texte et sa voix m’accompagne ensuite tout au long de la traduction. Je suis alors une enfant à qui l’on fait la lecture. Dans ses livres, il évoque aussi combien il a été marqué par les histoires que lui lisait sa mère. C’est donc à la fois une relation d’écrivain à écrivain et une rencontre entre deux enfants. Dans cette relation, il y a quelque chose qui tient plus du fraternel que du filial, alors qu’en fonction de nos âges, les gens ont tendance à penser qu’il serait une sorte de grand-père pour moi. »

On peut voir la bande annonce du Kaddish des Orphelins sur le site de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, ici.